Mission Basilic – HH1 – David Weber

Mission Basilic de David Weber

Honor Harrington, tome 1

L’Atalante

Quel amateur de SF ne connaît pas les noms d’Honor Harrington et de son géniteur David Weber ? La réputation du cycle dépasse largement les frontières de l’Amérique. Pourtant cette référence en matière de Sf militaire est souvent parfois décriée en France,  en raison des deux blocs antagonistes s’affrontant impitoyablement. J’avoue ne pas comprendre le mépris que le cycle reçoit alors qu’il est franchement apprécié par nombre de lecteurs de littérature de genre. Je conçois que les goûts différent d’un individu à l’autre, j’ai du mal avec le fantastique (loin d’être mon trip) mais je ne le considère pas comme un sous- produit….

Je vous propose de découvrir mon point de vue sur la célèbre Honor Harrington, une femme, arf! Une sacrée bonne femme!

Mission Basilic nous propose de suivre le début de l’ascension d’un officier de la flotte manticorienne : Honor Harrington. Jeune femme habile et charismatique, ce capitaine de vaisseau manque un peu de diplomatie, mais point de loyauté, ainsi sa fidélité à un ancien amiral -dont les préceptes ne font pas l’unanimité parmi la jeune garde montante – va-t-elle valoir à Honor l’animosité de l’étoile du moment. Du coup, elle se retrouve mutée à Basilic, le placard de choix des brebis galeuses de l’amirauté de Sa Majesté. Sa détermination à servir son royaume, son sens du devoir, sa volonté à remplir sa mission vont la conduire à mettre à jour des bizarreries… et même un complot….

J’ai mis quelques années avant de lire ce roman. Certains lecteurs l’encensaient, d’autres ainsi que beaucoup de critiques le taxaient de « militariste »,  un adjectif avec une connotation très péjorative, dénonçaient ses relents « réactionnaires », le manque de vision ainsi que son bellicisme sous-jacent. Cela m’avait fortement dissuadée de m’attaquer à cette série. J’ai franchi le pas, et je suis étonnée par ma lecture.

Certes, je ne le comparerais à la saga Vorkosigan, dont l’humour, la plume et l’histoire forment un tout absolument délicieux. Cependant, H. Harrington ne démérite pas : actions, complots et batailles spatiales sont au rendez-vous associés à un univers complexe et riche qui titille l’imaginaire.

Je ne ferais pas de parallèle avec des auteurs comme Simak, Heinlein ou Poul Anderson, car Mission basilic n’a ni l’ambition, ni la profondeur des œuvres référence de ces auteurs. Nonobstant cette légère réserve, ce roman est agréable, prenant, et totalement immersif. En terme de sf militaire, David Weber nous livre un récit plus abouti qu’Indomptable de Jack Campbell ou que De haut-Bord de Paul Honsinger. Le roman se distingue par la description d’un univers plus élaboré, avec des ressorts politiques plus soignés que les deux œuvres que je viens de citer. Manticore ressemble davantage à une monarchie victorienne qu’à une organisation militaire. La République du Havre quant à elle, tient davantage des républiques populaires de notre monde actuel (Corée du Nord) ou des ex- républiques soviétiques. Mais ce n’est pas une simple transposition. La France de la Terreur y est représentée à travers un personnage sinistre, Robert Pierre, qui applique la même méthode d’administration, allié aux fanatiques membres de la SerSec  (Waffen-SS), cela donne un régime totalitaire efficace et effrayant, un peu comme dans V pour Vendetta. Les antagonistes de Manticore, les havriens sont intelligents, malins, d’un positionnement politique certes tranché (France de la Terreur + Union Soviétique) et assumé, mais qui présente une structure économique et sociale consistante. Bref, les ennemis ne sont pas des neuneus ou des caricatures.

Alors que penser de ce qualificatif si dégradant : « militariste »  ?

Déjà, il faut s’entendre sur la définition de militariste. Mon Petit Larousse Illustré donne la suivante :

Militariste : adj. Relatif au militarisme.

Militarisme : n.m.

1- Système politique fondé sur la prépondérance de l’armée.

2-  Exaltation des valeurs militaires.

Effectivement, d’un point de vue purement objectif – et sans y attacher un quelconque jugement péjoratif – ce roman peut être qualifié de militariste. Le seul hic, c’est que les critiques lues concernant son militarisme sont orientées péjorativement. L’ auteur  ferait l’apologie du système militaire et de la guerre. Or, ce n’est pas ce que fait David Weber. Deux empires stellaires sont en conflit… et le lecteur suit les opérations militaires qui s’ensuivent. Étonnant, non? (mais peut-être qu’imaginer un empire stellaire futur en conflit, c’est mal…)

A moins que l’on estime que suivre l’évolution du personnage DANS LE MILIEU où il évolue est anormal : ses chefs, ses subalternes, ses interlocuteurs sont quasiment tous militaires;  surprenant, non pour un militaire? Militariste car à part les militaires, tous les autres sont des affreux? Là, aussi, ce n’est pas le cas. Il y a des bons et des mauvais dans l’une et l’autre « catégorie » de la population. Mais, le plus gros point de reproche que l’on peut pointer, c’est que David Weber n’écrit pas : « LA GUERRE, C’EST MAL ».

En revanche, ce tome ne manque pas d’un certain manichéisme, car globalement tous les Havriens sont « mauvais » alors que tous les manticoriens semblent « bons »… Ceci dit cela facilite l’identification à une grande puissance économique, et par déduction, l’autre camp représente les soviétiques (rien d’original, beaucoup d’auteurs américains ont été influencé par la situation géo-politique de l’époque).

En ce qui concerne l’histoire en soi : la trame sans être des plus originales est bien menée , les combats sont intéressants et visuels avec un côté voyage dans l’espace assez familier (trous de ver) et plutôt bien amené (pour des non-spécialistes), enfin, une héroïne à dimension humaine brillante certes, mais également bien secondée.

Pour résumer, un bon roman de SF, un excellent roman de sf militaire dont l’héroïne est bien exploitée, une trame sympathique, un univers complexe et immersif. Ce fut une bonne surprise, et j’ai passé un excellent moment.

Effectivement, le lecteur allergique à toute institution/forme militaire passée, présente ou future, ou aux valeurs que celle-ci véhicule ne trouvera pas son compte dans la série des Honor Harrington. Et après tout chacun ses goûts et aspirations question lecture.

J’ai lu ce tome en début d’année. La critique a été revue et corrigée depuis! ( non parue sur ce blog).

Autres tomes :

Tome 2Tome 3Tome 4

Autres critiques :

HerbefolBlog ImpromptuL’ours Inculte

Le livre :
35011
Traduit par : Arnaud Mousnier-Lompré
Illustrateur : Genkis
ISBN13 : 9782841725731
Nombre de pages : 496

41 réflexions sur “Mission Basilic – HH1 – David Weber

  1. Concernant la polémique à propos d’un livre jugé militariste, et de tout ce que sous-entend ce qualificatif dans la bouche de ceux qui l’emploient, pour moi la réponse est très simple : la polarisation politique (à gauche, est-il besoin de le préciser ?) de l’édition SFFF / critique / des auteurs français(e). Alors j’entends déjà les cris d’orfraie, « Ah non mais ça, c’était avant, dans les années 60/70, maintenant ce n’est plus le cas ! », n’empêche que souvent, il y a vraiment de quoi émettre de gros doutes… Dès lors, l’emploi de termes comme « réactionnaire » ou (avec une emphase péjorative) de « militariste » (terme idéologiquement orienté) au lieu de « militaire » (terme qui se borne à décrire objectivement parlant le contexte dans lequel évoluent les personnages) n’a plus rien d’étonnant. Tu remarqueras que les mêmes n’ont pas de qualificatif assez dithyrambique à chaque fois qu’un livre exalte des valeurs de gauche, quelle que soit d’ailleurs la valeur (ou son absence) littéraire ou SF de l’objet. Seuls quelques uns sont assez intelligents pour promouvoir des auteurs lourdement engagés ou connotés à droite (Mnemos avec Heinlein, le Belial’ avec Poul Anderson, Quarante-deux avec Card) au lieu de les ostraciser.

    Bref, moi je ne lis pas de SF pour faire de la politique, ce qui m’intéresse, c’est l’oeuvre et sa qualité, pas mon adéquation avec les idées de l’auteur (ou pas). Du coup, je lis des écrivains de gauche, de droite, du centre, de l’extrême-gauche, de la droite anarchiste (oui, ça existe), de la diagonale et de l’orthogonale, et le reste, je le laisse aux militants de tout bord.

    Sinon, pour moi, Havre est clairement inspirée par un mélange de la France de la Terreur (Robert S. Pierre, la Nouvelle-Paris, etc), de l’Allemagne nazie (SerSec n’est autre que la Waffen-SS) et de l’URSS (les commissaires politiques).

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    • C’est également ce que je pense. Le monde littéraire français est resté bien ancré dans un positionnement politique (après tout, il ne faut pas oublier l’origine de la création des FNAC). Cela se sent encore dans les critiques des livres des revues spécialisées. En même temps, une fois la grille de lecture connue, le déchiffrage des avis est asses aisé, je fais mon choix en conséquence ensuite même si les avis des blogueurs importent bien davantage à mes yeux. Ils sont généralement moins pollués par des considérations politiques. En cela, je trouve les blogs plus sain et plus sincères.
      Je n’ai pas voulu exprimer ces point de vue ouvertement pour éviter la surenchère de polémique (même si cela ne crains pas grand chose). Je me suis déjà fait avoir par des critiques dithyrambiques sur d’infâmes bouses très orientées politiquement (dans le bon sens du milieu littéraire parisien – voilà, je sais utilisé les clichés moi aussi).
      J’ai même lu La guerre éternelle d’une édition comportant une préface qui descendait le livre et l’auteur en flamme en raison, du thème et de la nationalité…

      Bref, les chantres de l’ouverture d’esprit et de la tolérance sont bien hermétiques aux idées autres. Cette psychose m’agace profondément.
      Pour ma part, peu me chaux la nationalité de l’écrivain, son équipement 2 ou 3 pièces, ou s’il est bleu, vert ou noir… Tant que j’y trouve mon compte, c’est bon. Et comme tu le dis magistralement, il:elle peut aussi être de diagonale ou en transversale,….
      Je veux que l’on cesse de tenter de m’apprendre à penser « correctement ».
      Du coup, cela fait régulièrement surface dans certaines critiques (Exemple, je n’apprécie pas d’être traitée de bas du front car j’aime bien Campbell – donc je suis trop bête pour comprendre des livres d’une envergure plus « humaniste »).

      Pour en revenir au bouquin, tu as tout à fait raison pour Havre, je l’ai noté mais complétement oublié de l’écrire. Je m’en vais corriger cela.

      Un grand merci, pour le commentaire et la discussion!

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  2. « manichéisme, car globalement tous les Havriens sont « mauvais » alors que tous les manticoriens semblent « bons » » : ça s’améliore dans les tomes suivants (mais pas dans le 2-3-4 cependant…)…

    Xapur : Il faut d’urgence remédier à cette lacune… 🙂

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  3. J’ai commencé ce roman parce que j’en avais entendu beaucoup de bien mais, malheureusement, après 100 pages, j’ai dû le remiser. Non pas parce que ce n’était pas bien (bien au contraire !), mais parce que des lectures prioritares se sont immiscées dans mon agenda… Faudra très vite que je trouve le temps de m’y remettre parce que ce n’est pas l’envie qui me manque…

    A.C.

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  4. Encore une série que je me suis juré de lire un jour. Oui un jour, c’est toujours le même problème… 😀
    En tout cas, ça semble se rapprocher de ce que je recherche dans un space-opera « militaire » : des belles manœuvres spatiales, un univers dense et cohérent. C’est juste dommage que l’antagonisme Manticore-Le Havre semble se rapprocher d’un conflit occident-communisme… Mais peut-être que cela évolue dans les volumes suivants.

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    • C’est un peu plus complexe qu’un conflit occident/communisme, car le Havre teint beaucoup de la pèriode de La Terreur en France, avec du communisme, et d’autres influences. Ce qui en fait un univers intéressant. Manticore de son côté ressemble aussi à l’époque victorienne – en bien plus moderne.

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      • La principale inspiration historique est celle de l’opposition entre la France de la Révolution puis de l’Empire (Havre) et le Royaume-Uni (Manticore). Et ça se voit bien dans la suite de la série, quand on connait un peu notre réalité historique. 🙂
        Personnellement, le reproche que je ferai à cette série ne se limite pas au militarisme, qui est quand même bel et bien présent. Quand on te fait sentir qu’un ambassadeur ne peut rien résoudre parce qu’il a une vision de type qui pense qu’on peut arranger les choses en discutant alors qu’en fait la seule vraie bonne solution c’est d’y aller avec l’armée, c’est indiscutablement militariste et en plus pas subtil pour deux ronds.
        Mais le discours de Weber va plus loin. Ainsi on oppose un Havre où ces feignasses de chômeurs sont entretenus à coup d’alloc alors que tout est beau et florissant dans le royaume manticorien à l’économie bien capitaliste. Et sur ce plan là, ça ne s’arrange pas au fur et à mesure que l’on avance dans la série. A Manticore tout marche bien parce qu’on laisse les gens s’enrichir par leur travail et l’idée de taxer quoi que ce soit prend vite des allures d’horreur sans nom (y a un passage où il est question d’imposer un impôt progressif et c’est vu comme néfaste au possible). J’ai vu quelqu’un dire que Manticore est une « Mary Sue nation » et en fait ça résume assez bien le truc.
        En terme de protagonistes, les amis de HH sont généralement intelligents, courageux, etc. alors que ses ennemis sont tout le contraire. Les épisodes où elle se lance en politique sont très caractéristiques de la chose : ses alliés politiques sont vertueux, compétents, intelligents, ses adversaires sont pourris, corrompus, lâches, nuls, etc.
        Quand aux intrigues romantiques (parce qu’on passe aussi par cette case là), c’est grotesque à souhait et navrant.
        En fait, pour moi, le seul plan sur lequel Weber est bon (et c’est ce qui me fait encore un peu tenir dans cette série) c’est l’action spatiale. Ces passages sont vraiment bien fichus. Pour le reste on trouve nettement mieux ailleurs.

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        • Oui, effectivement, l’inspiration historique est France/GB, nuancée avec quelques touches des républiques populaires. C’est ce que je note dans cette chronique et celle du tome 2 dont la source devient encore plus apparente.

          Quant au militarisme, il est présent si le choix est de le voir et d’en chercher les preuves. Oui, la part est faite belle à HH et ses compagnons. C’est également le cas dans de très nombreux romans de fictions où les héros sont mis en avant. Certes, il y a beaucoup mieux et plus subtil, j’en conviens, surtout en SF.
          Pour le cas de l’ambassadeur, je ne pense pas que ce soit dans ce roman, où je n’ai pas trouvé pour ce premier tome le trait forcé.

          Je lis une série dans laquelle c’est un commerçant galactique qui est meilleur que les ambassadeurs, et qui jouit d’un traitement romanesque de premier plan. Ce n’est pas pour autant que je vais le juger « commercialiste ». Dans une autre, c’est le médecin de bord qui transforme en or tout ce qu’il touche. C’est un peu excessif d’ailleurs, mais je ne vois pas le roman comme tentant de montrer combien les médecins sont des êtres supérieurs. Alors, oui, HH est de cette veine de héros sans trop de subtilité dans les histoires contées où elle sera mise en avant. Du coup, non je n’y vois pas du militarisme.
          Dans un roman de sf militaire, les militaires sont les héros, s’ils étaient autre chose, cela passerait sans doute mieux, et cela j’en suis convaincue.

          Pour l’instant, je n’ai pas lu le cas de l’ambassadeur. Sur ce tome, les « méchants » sont surtout des collègues de HH.

          Après, la question devient plus politique, chose que je refuse de discuter sur mon blog que je veux apolitique.
          Simplement, je n’oublie pas la date d’écriture de l’ouvrage, fin de la Guerre Froide, que les américains ont une éducation, surtout dans les années de confrontation avec l’URSS, anti-soviétique et pro-capitaliste. J’y vois dans les écris de Weber une marque de cette éducation. Je suis assez grande pour penser par moi-même comme beaucoup, je relativise ce que je lis.
          Inversement, nous trouvons pleins de récits très anti-capitalistes ou très anti-technologie et je ne vois pas beaucoup de grincements de dents.
          Personnellement, je lis de tout, de toutes les couleurs, je fais le tri et je ne vais pas crier : Ceci est nul c’est anti-capitaliste, ceci est de la merde, c’est anti-marxiste, ceci c’est trop rouge, ceci c’est trop anti-français, ceci trop anti-américain. C’est à chacun de faire son propre tri en fonction de ses sensibilités surtout que je n’oublie pas qu’un célèbre philosophe nous enseigne qu’il n’y a point de vérité, que des points de vue.

          Ensuite, quand tu lis ce genre de récit, c’est un peu comme les James Bond, l’agent 007 s’en sort toujours sans égratignure (c’est lui le meilleur), et si cela ne passe pas, je conseille alors de regarder autre chose (ma sœur se reconnaitra).

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  5. Ce n’est pas un chef d’œuvre, mais j’ai apprécié ce roman.
    C’est à la fois le fait qu’il colle un peu trop aux romans de Forester, et le très bon rendu de la réalité militaire (hiérarchie, valeurs vues comme conservatrices) qui déplaisent en France. Et le position de « l’intelligentsia » très bornée n’arrange rien vis-à-vis de la culture made in USA, on confond très souvent l’œuvre et l’auteur. Sans doute un manque « d’intelligence » quelque part pour une population qui se dit tolérante et ouverte d’esprit.

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  6. Premièr embarquement à bord du Weber-harrington, et première incursion dans la SF militaire (je sais j’aime prendre mon temps) eh bien sans préjugés ni beaucoup de comparaison je dois dire que j’ai aimé.
    Une femme aux commandes (et quelle femme!) un univers minutieusement décrit tant sur le plan technique que politique, des relations humaines solides et complexes et pour finir des batailles haletantes! Je resigne pour un nouvel engagement sans hésiter.

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