Waylander – David Gemmell

Waylander de David Gemmel

Drenaï, tome 1

Bragelonne/Milady

 

« Le Roi de Drenaï a été assassiné. Une armée d’envahisseurs déferle sur le pays, avec pour mot d’ordre de tuer hommes, femmes et enfants. Mais tout espoir n’est pas perdu. Il repose sur les épaules de celui que la nation surnomme Waylander. Seul, il va s’aventurer en territoire nadir pour retrouver la célèbre Armure de Bronze, symbole de liberté. Mais peut-on faire confiance à ce Waylander ?… Après tout, c’est lui qui a assassiné le roi. »

Tout espoir reposerait sur le régicide ?… surprenant comme approche. A-t-il assassiné un tyran comme bons nombres de cycles de fantasy le proposent dans une approche manichéenne,  le bien versus le mal ?

Aura-t-on un récit plus ambigu comme je le souhaite? A-t-on droit à une énième histoire d’élu et d’artefact unique ?

Voici une partie des questions qui me sont venues à l’esprit en lisant le quatrième de couverture. Mais en fin de compte, Waylander honore parfaitement sa réputation.

Il était temps que je me lance dans les récits de David Gemmell. Cette lecture correspond à un des objectifs que je me suis fixée :  lire trois de ses romans, elle concourt également au 5° challenge de l’Imaginaire. Mon choix s’est porté vers Waylander, et non pas Légende premier roman de l’auteur car il s’agit  du tome ouvrant le cycle de Drénaï. J’ai donc préféré l’ordre chronologique à celui de la publication.

L’envie de se frotter à l’auteur britannique parti trop tôt est essentiellement liée aux divers billets des blogopotes qui encensent nombres de ses romans (notamment : l’ours incultela bibliothèque d’Aelinel – ). Ainsi que je l’ai suggéré en introduction, je n’ai pas été déçue par cette première prise de contact.

L’univers est certes classique dans une fantasy post années 80, avec son décor pseudo médiéval, un technologie qui n’a pas encore découvert la poudre, des armes de mêlée limitées aux épées, sabres, ou masses d’armes et des attaques à distances avec le maniement de l’arc et l’arbalète élevé au rang d’art.

L’économie, la politique, toute la société baignent dans ce cadre classique et parfois usé jusqu’à la corde, comme les vêtements de nombres de protagonistes du roman. Le lecteur y retrouve la violence et les conflits agrémentant toute cette littérature, et fantasmant un ancien temps peu reluisant où le bonheur était exclu au profit de la crasse, de la maladie et de l’éreintement chronique. L’univers est archi-connu et utilisé au point d’être souvent lassant. Si lassant que l’amateur de fantasy recherche autre chose, pour vivre des aventures nouvelles, pour voyager au-delà de ces frontières de l’imaginaire.

Avec Waylander, il n’en est point besoin. L’ambiance décrite plus haut est tout à fait exacte, conforme à la dark fantasy. Toutefois, l’auteur joue avec l’ensemble des codes avec une belle maîtrise et magnifie cette épopée de fantasy. Ici des frappes chirurgicales, là des traits appuyés à bon escient, puis un petit clin d’œil, un passage mené à un train d’enfer, rien dans l’univers de Drenaï ne lasse. Le lecteur est happé; hors de question qu’il ne s’échappe avant le mot « fin« .

Le discours concernant les protagonistes est du même tonneau. Un vrai dur – checked, une damoiselle en détresse – checked, l’acolyte rusé, checked, le méchant – checked. ici encore, tout est calibré, efficace et captivant. Waylander en parfaite figure de l’anti-héros – Gemmell pousse le « vice » à l’habiller de cuir noir – flirte avec le stéréotype, si ce n’est le petit détail qui contrebalance les carcans. Danyal n’est pas si impuissante que cela, et elle possède des ressorts intéressants. Il en va de même avec Dardalion qui joue parfaitement sa partition, connaissant parfaitement ses forces et faiblesses et usant de la situation. Impossible de ne pas s’attacher aux personnages.

Quant à l’histoire, relativement classique, nous réserve son lot de moments de bravoure, quelques scènes intimistes et une action omniprésente qui rythme parfaitement le récit.

La critique principale que j’avais lue sur David Gemmel, l’écrivain, concernait l’aspect « utilitaire » de sa plume. Il est vrai que je ne peux pas louer l’originalité ni le lyrisme de sa prose, mais à aucun moment je n’ai été perturbée par celle-ci. Finalement, son style s’adapte parfaitement au dynamisme du roman.

En y regardant de plus prés, je noterai au rang des bémols l’utilisation de grosses ficelles, un ou deux deus ex-machina, l’héroïsme en tant que ressort principal (et presque exclusif- du roman) ainsi qu’une trame classique (et très efficace).

L’ambiance très sombre, la violence présente, le pitch global, les duels ainsi que le personnage principal courtisent avec les westerns de Sergio Léone. Mais qu’importe le package, pourvu qu’on ait la griserie. Je me suis bien régalée avec ce roman et c’est tout ce que je lui demandais.

Waylander est un roman de dark fantasy qui se vit et qui ne s analyse pas. C’est ainsi que le lecteur en tirera la substantifique moelle, dégustera un récit effréné, abreuvera son imaginaire de combats épiques, et savourera la personnalité d’un héros à l’âme éprouvée et la lame endurcie.

Autres critiques :

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autres tomes :
Challenges :
Challenge Littérature de l’Imaginaire – 5° édition

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Le livre :
  • 352 pages
  • Traducteur : Alain NÉVANT
  • Date de parution : 19/10/2001

27 réflexions sur “Waylander – David Gemmell

  1. C’est bien la première fois que je lis quelqu’un (la ou les personnes que tu mentionnes) qualifier l’écriture de Gemmell d' »utilitaire ». Personnellement, j’ai toujours été frappé par son côté hyper-immersif et fluide, et tout ça sans recourir à des effets de manche (c’est sans doute cette absence de mots à coucher dehors et autres circonvolutions stylistiques qui relève du qualificatif « utilitaire »). Voilà, pour moi, au contraire, la marque d’une grande écriture, celle atteignant le maximum d’efficacité sans fioritures. Ce qui fait que je n’hésite pas à qualifier Gemmell de membre du cercle fermé des plus grands écrivains de Fantasy du siècle précédent. Justement parce qu’avec une écriture « simple » et un univers / une trame classique, il a su enchanter des millions de lecteurs même si, dans le fond, il propose toujours un peu la même chose (mais on s’en fout, c’est tellement bien fait !).

    Une précision : si l’univers te paraît classique sur ce livre, personnellement je considère que via les tomes 3 et 4 du cycle Rigante, Gemmell est un des précurseurs de la Flintlock Fantasy, et que donc, il était en avance sur son temps.

    Sinon, solide critique, comme d’habitude. J’espère que tu seras motivée pour poursuivre la découverte de cet auteur, il en vaut le coup !

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    • C’est ce que j’ai lu. ce terme « utilitaire » m’avait vraiment marquée par un certain côté snob. Et j’ai voulu montrer qu’effectivement Gemmel avait un style sans fioriture et sans écriture du style « t’as vu comme j’écris bien et jolié, mais que tu te laisse gagner par sa plume alors même que le tout est assez classique et déjà lu. Mais c’est si puissant que tu ne peux rien lâcher. je l’ai lu en 48 heures!

      Je suis te ton avis, c’est ce que l’auteur parvient à dégager et provoquer qui fait la qualité de sa prose. pour moi, c’est une grande réussite.
      Et comme tu dis, il propose peut-être la même chose, des choses classiques, mais on s’en fout éperdument. C’est une vraie « ivresse » en le lisant.
      Je comprends parfaitement ton point de vue sur grand écrivain de Fantasy.

      Oui, je suis motivée pour lire la suite!

      Merci Apo! 🙂

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  2. J’ai beaucoup aimé cette série, même si j’ai une petite préférence quand même pour d’autres cycles comme Le lion de Macédoine ou Rigantes. En tout cas ta critique rend bien hommage au roman (et encore une fois j’aime beaucoup la mise en scène sur la photo^^)

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  3. J’aime beaucoup la référence à Leone, c’est pour moi exactement le même plaisir. On sait que c’est outré, que c’est bigger than life, mais c’est un conteur hors pair et il est impossible de la lâcher quand on commence.
    Les dialogues son parfaits, là aussi, certaines répliques valent bien les plus légendaires de Eastwood chez Leone (« Toi, tu creuses ! »).
    Pour finir sur l’écriture, je suis d’accord avec Apophis : quand tout semble tellement évident et simple, c’est qu’on a un maître. Comme Elmore Leonard auteur de polars et westerns qui, concluait ses 10 conseils d’écriture par « La plus importante de mes règles résume toutes les autres. Si ça a l’air écrit, je réécris. »

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    • C’est exactement cela, on sait que c’est un poil too much, mais impossible de décrocher.
      Dialogues excellents, et je vais garder en mémoire cette citation qui est parfaite pour l’écriture. C’est surtout que je ne savais pas comment tourner, que justement je n’avais rien remarqué et que je m’étais juste laissée porter par l’histoire.
      Merci beaucoup! 🙂

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      • Oui ça se passe avant Légende, et oui ça y ressemble BEAUCOUP !
        Ceci dit, si on aime le style Gemmell, ça se lit très bien, c’est un vrai page turner mais il ne faut pas lire Waylander et Légende de manière trop rapprochée car la parenté (gé(m)mellité ? haha, bien trouvé ça ! 😀 ) est flagrante ! Il y a un siège, des personnages qui se ressemblent, etc… Mais pourtant, c’est du Gemmell, et j’aime ça ! 😉

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        • Je vais suivre ton conseil. Je pense lire les 3 Waylander de manière rapprochée, et voir si je passe à une sautre saga, ou si j’attends l’année prochaine pour lire la suite de Drenaï. C’est terrible en tant que page-turner!
          J’adore ton jeu de mot. C’est le genre d’humour qui me fait rire.

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  4. Il y a tellement de livres de David Gemmell que j’ai appréciés :). Comme toi, j’ai commencé par Waylander, qui m’a beaucoup plu, mais j’ai encore plus adoré Légende. A ma grande surprise, j’ai néanmoins une nette préférence pour Dark Moon, un one shot acheté sur un coup de tête 😮 !

    Dans tous les cas, ça reste une valeur sûre à ressortir dès que l’on cherche une bonne histoire d’heroic et de dark fantasy 🙂

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  5. Moi aussi, il est plus que temps que je m’aventure dans les récits de David Gemmel. Sans doute avec Dark Moon justement.
    J’aime beaucoup la teneur de ton dernier paragraphe, une fois de plus il retourne comme une crêpe mon vœu de pondération 😉 Sacré lutin va !!! 🙂

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    • Dark Moon semble prometteur effectivement.
      Ah, mais quand j’aime, je souhaite convaincre qu’il vaut le détour. Ensuite, en fonction des goûts, j’y parviens ou pas! 🙂

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