La Rose Blanche de Glen Cook

Cure détox pour la Compagnie Noire

Les annales de la compagnie noire,

Les livres du nord tome 3

L’Atalante

Le blanc, symbole de pureté pour les occidentaux, de deuil dans la culture asiatique.  Si l’un se prête parfaitement à la situation du tome présent, l’autre se conjugue mal avec la réputation et les actions de la célèbre, mais décimée Compagnie Noire. Ceci dit, notre bande de mercenaires – tous plus velus (et couillus) les uns que les autres – semble chercher à s’acheter une nouvelle virginité, ou tout au moins prendre un chemin de rédemption après les différentes aventures contées par Glen Cook.

C’est donc avec délices, que je me suis fait engloutir dans la fange de la Plaine de la Terreur. Pour tout dire, mon débarquement sur place n’a pas été de tout repos, et j’ai même couiné à un moment ou un autre, avant de me laisser emporter tel le fétu de paille sous l’action d’un zéphyr enivrant!

Commençons donc par le commencement. Ne vous inquiétez pas, je ne dévoile que très peu d’éléments de la trame des tomes précédents. Les résumés de l’éditeur offrent davantage….

L’univers est inchangé même s’il y a des évolutions.

Nous avons fait nos premiers pas dans les traces de La Compagnie Noire dans le roman éponyme. La découverte fut sensationnelle; la prise de contact avec ces mercenaires de tout crin et horizon, un rafraîchissement corsé et plein de peps. La touche enivrante provenant de l’absence de dichotomie, du choix du capitaine de la dite compagnie d’offrir ses services à La Dame – ou plus exactement à Volesprit un de ses Asservis – puis s’apercevoir que ce n’était pas le « bon » camp!!

Par la suite, les Rebelles matés par la splendide et terrifiante magicienne, nos sombres soldats prenaient leurs quartiers d’hivers à Génépi (non, pas la liqueur). Un étrange Château noir (d’où le titre du deuxième volume) intriguait Toubib et sa bande en raison de son aura négative, de sa croissance importante ainsi que la disparition suspecte de morts et de moins morts…

Ainsi, l’objectif de la Dame évoluait sans coup férir : le Dominateur, un sorcier maléfique – et accessoirement son époux – menaçait de revenir imposer sa loi.  C’est alors que le lecteur apprenait l’existence d’une prophétie, dont le contenu est des plus classiques dans la fantasy : une élue destinée à abattre l’affreux tyran, la Rose Blanche.

Généralement un pitch comme celui-ci a tendance à faire sonner de multiples alarmes chez moi, et seules des chroniques convaincantes parviennent à éviter ma fuite. Et Glen Cook.  Je n’imaginais pas une seconde que notre bougre d’écrivain nous servirait des fadaises sur un plateau d’argent noir. Oui, et non en fait. Car nous avons bien une trame générale conforme à  ce genre de conte : la belle jeune femme à la tête d’une bande de compagnon qui se porte à l’assaut de la terrible et malfaisante sorcière. Checked, La Rose Blanche a tout à fait ces intentions… Mais point de fadaises ici, car Glen Cook utilise un canevas parfaitement classique pour l’agencer à sa sauce, et cela déménage!

Le cycle appartient sans aucun doute à la dark fantasy.

Revenons à nos moutons nos briscards.

A la fin des événements de Château Noir, la Compagnie – ou ce qu’il en reste, décide de la jouer sioux et de mener une exfiltration loin des conflits contre les rebelles – ou ce qu’il en reste.  En sus, elle se trouvait prise dans les feux croisés ou directs des Asservis – ou ce qu’il… La zone n’était pas des plus prometteuses en terme de longévité et leur conscience les tiraillait « sévèrement », même si tout est largement relatif dans cette contrée.

Ainsi, vécurent-ils en paix pendant un certain temps loin des yeux de la Dame et de ses Asservis (ou ce qu’il en reste…), occupée à organiser, gouverner son Empire et former de nouveaux mages à sa botte.

Sept années ont passé, la Compagnie Noire s’est réfugiée dans la Plaine de la Terreur, avec Chérie. Cette dernière est devenue une belle jeune femme, toujours muette mais capable de communiquer parfaitement ses points de vue, ses ordres et ses émotions en langage de signes (et par ses regard). Il est bon de noter que son champ de nul s’accroit de plus en plus les années passant, neutralisant les pouvoirs magiques des sorciers de la Compagnie (Silence, Qu’un Œil et Gobelin).

L’élection de la Plaine de la Terreur comme domicile n’est sans doute pas étranger à ce calme. J’avoue que mon atterrissage dans cette contrée inhospitalière n’a pas été des plus aisée. Initialement j’étais déboussolée, un poil déçue même tant le paysage décrit ne collait pas avec mon film imaginaire : des menhirs qui parlent, des coraux, d’immenses baleines volantes, des mantes gigantesques et des couleurs psychédéliques, rouge, violet, mauve. Bref, un décor appartenant davantage à l’univers fantastique (à mes yeux)  qu’aux plaines de la Compagnie Noire. Mais Glen Cook a du talent, et après deux ou trois voyages, je m’y suis habituée et me suis laissée séduire par cette atmosphère particulière, faussement tranquille.

La Dame, elle ne s’est pas laissée prendre dans cette torpeur bizarre, mais avant d’achever sa campagne et sa main mise sur tout l’Empire, elle doit renverser la Rose Blanche.

Le problème est épineux et nous promet une belle intrigue :

  • Le champ de nul de Chérie est un premier soucis à contourner,
  • La Rose Blanche opte pour une tactique agressive et téméraire (et cela paraît fonctionner),
  • La plaine de la Terreur n’accueille pas les troupes impériales avec sympathie, et les espèces présentes sont du genre coriace,
  • Du côté des Tumulus où repose son époux, le Dominateur, des signes inquiétants se manifestent. Le Dominateur possède de nombreux partisans…

C’est ensemble d’écueils et d’obstacles nous offrent une intrigue palpitante, et enfin la confrontation tant attendue entre la Dame et la Rose Blanche. Cette dernière sait pertinemment qu’elle ne peut rester en repli dans la Plaine. Les espèces pensantes ne les accueilleront peut-être pas indéfiniment.  Déjà, que les menhirs rabâchent sans cesse à Toubib, « Il y a des étrangers dans la Plaine. »… Sa stratégie de harcèlement faite de coups de mains rapides, d’actions de guérillas, de manifestations de pouvoir n’est pas viable à long terme. Et surtout, même si elle marque les esprits, elle ne fait que chatouiller de manière déplaisante la Dame, ses Asservis et ses troupes.

Le salut passe forcément par un affrontement brutal des forces et des dames en présence. Mais la Compagnie Noire et les quelques alliés de la Rose Blanche ne feront pas du tout le poids, à moins qu’elle ne rentre en possession d’un élément déterminant qui fera irrémédiablement pencher la balance dans son camp. C’est Toubib et ses comparses qui s’y collent avec l’aide d’un nouveau venu Traqueur et son chien.

La structure narrative alterne entre les annales proprement dites tenues par le médecin, et des lettres-colis racontant l’histoire d’un certain Bozman, un antiquaire dont les agissements nous apparaissent rapidement suspects, datant d’un siècle environ. La relation avec la guerre Dame vs Rose Blanche nous échappe, mais impossible d’écarter ces derniers, car l’importance de cette partie suinte par toutes les fibres des parchemins. Les textes tiennent aussi bien de la biographie que du récit d’espionnage, et méritent une enquête sérieuse… et périlleuse.

Il est à noter, que l’auteur a une nouvelle fois modifié son approche, il ne s’enferme pas dans le confort en utilisant un procédé qui a fonctionné par le passé.

Le lecteur palpite lors de la lecture de ce troisième tome, batailles et stratégies osées, créatures et magie spectaculaires, adversaires coriaces, enquête périlleuse, infiltration sournoise, nos héros en danger, des personnages captivants et pour couronner le tout une confrontation qui répond à nos attentes.

Les nouveaux venus Traqueur et son chien ainsi que Bozman sont particulièrement réussi. Le premier entretien une relation fusionnelle avec son compagnon canin qui frise le l’obsession; et parfois une atrophie du cerveau ou au contraire une singulière présence d’esprit qui provoque tantôt l’admiration, tantôt des frissons. Bozman quant à lui est conforme à toutes les guest star de l’auteur : un protagoniste très solide, avec de l’ampleur, des nuances et ici, une double-vie qui exploite toutes ses nuances.

Nos personnages familiers sont égaux à eux-mêmes, et c’est un véritable plaisir de les revoir.

La Rose Blanche est vraiment intéressante, même si La Dame avec sa panoplie tout en charme et en nuance lui vole la vedette. Il n’est guère étonnant que Toubib ait éprouvé un tendre sentiment quelques années auparavant. D’ailleurs, la flamme et la fascination ne sont pas éteintes, et il suffit de quelques rappels pour que l’étincelle jaillisse. Cette petite touche sentimentale apporte une petite douceur bienvenue, et quand l’écriture et la construction sont au diapason ce n’est que du bonheur!

Pour conclure.

La Rose Blanche est un roman de dark fantasy qui alterne deux récits, dont l’énigmatique biographie d’un antiquaire. L’action est au rendrez-vous notamment avec des batailles d’envergure, des sortilèges spectaculaires; alliée à un sentiment d’urgence et de danger qui accroche le lecteur jusqu’à la dernière page. Les personnages auxquels nous sommes attachés sont présents, et toujours aussi dingues, mais c’est la Dame elle-même qui renouvelle l’intérêt du lecteur. Intrigue et narration au service du suspens et de l’émotion : un régal!

A lire si :

  • vous avez aimez les deux premiers tomes, La Rose Blanche est un incontournable.
  • Si vous aimez la dark fantasy qui propose un récit vivant et intelligent, commencez par la Compagnie Noire, la récompense mérite le détour.
  • Si vous voulez découvrir un des acteurs phares de la Dark.

En revanche, je le déconseille aux âmes sensibles choquées par les gros mots, aux lecteurs qui n’aiment pas naviguer en eaux troubles, aux neurasthéniques à tendance claustrophobe et enfin, aux amateurs des seuls contes de fées.

$$$$

J’avoue que j’hésite sur le prochain tome avec lequel enchainer. D’une part, j’ai réellement envie de voir comment vont tourner les affaires de la Compagnie Noire. de l’autre, Apophis conseille de lire La pointe d’argent, une histoire presque parallèle mais sans l’ensemble du casting… Choix cornélien. Les deux à la fois peut-être! 😉

Merci Ami divin égyptien (ou astéroïde) pour cette merveilleuse découverte!!! 🙂

Autres critiques :

ApophisBoudiccaLorhkanL’ours inculte

Challenges :
Le livre :

 

26 réflexions sur “La Rose Blanche de Glen Cook

  1. J’ai toujours le même cheminement à chaque tome : Les 100 premières pages sont confuses, j’ai du mal à rentrer dedans, et passé ce cap c’est parti je le lâche plus.

    C’est pas plutôt La pointe d’argent le spin-off parallèle à lire après ?

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    • C’est la même chose pour moi. Les 100 premières pages, mon sentiment se partage entre le plaisir de retrouver nos joyeux drilles et la confusion. Un peu de mal à rentre dedans, et ensuite, je passe une partie de la nuit à le lire. (Le matin, je râle car j’ai peu dormi ….)

      Oho, j’ai donc noté de travers. Faut que je regarde!

      Et tu as raison! J’ai compté 3 tomes pour les livres du sud, et me suis fourvoyée. Merci, je rectifie. 🙂

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  2. C’est clair que Glen Cook n’est pas de ceux qui facilite la travail du lecteur, ses débuts de roman sont un peu confus. Mais alors après, quel plaisir !
    Aaaaah, la Plaine de la Terreur, un grand souvenir de fantasy !

    Bizarrement, je me suis arrêté à ce tome là, alors que j’ai tous les autres sur ma PAL… Faut que je reprenne ce cycle un jour !

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    • Ah! Oui! Il faut que reprennes la lecture. J’ai du me freiner pour ne pas continuer!

      Non, effectivement à chaque début de roman, il ne nous tient pas la main et c’est à nous de prendre nos marques. 🙂

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  3. J’avais adoré le premier tome de la Compagnie noire – la première fois que je lisais une histoire de fantasy « réaliste » question moralité, tripes et boyaux.

    Le tome 2 m’avait moins emballé et j’avais trouvé celui ci mieux tourné mais en deça du 1er. Du coup j’en étais restée là pour Cook. Je me demande si je n’aurais pas en fait du continuer histoire d’en arriver à La pointe d’argent ^^

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    • Ah! Ah!AH!
      J’espère bien convaincre, j’ai adoré et du coup c’est vrai que cela doit transparaître!

      Pour la compagnie des glaces, j’ai lu les premiers, mais j’ai calé. Je me les reprendrai plus tard quand j’aurai une PAL un peu moins énorme! 🙂

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  4. Que de bons et mémorables souvenirs ravivés grâce à ton savoureux billet *_*
    J’avais énormément aimé l’ambiance si particulière de la Plaine de la Terreur, et le récit de Bomanz était captivant.
    Glen Cook est décidément très fort pour nous surprendre, et nous asservir (hi hi, j’ai pas pu résister :D).
    « La pointe d’argent » clôture parfaitement les livres du Nord, et trouve bien sa place après celui-ci, je trouve ^^
    Allez, je me régale à l’avance de lire ta prochaine critique sur nos « couillus » préférés 😉

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    • Merci!
      J’adore aussi lire les billets des livres que j’ai déjà lu, surtout quand j’ai adoré ou que j’ai un attachement particulier!
      Glen Cook est un maître à sa façon des entrées en matière pas toujours aisée, mais ensuite, quelle immersion!!!

      La pointe d’argent sera ma prochaine lecture. Ha!ha! tu as apprécié nos « couillus »! 😉

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