Arkane de Pierre Bordage

 

La désolation

Bragelonne

Une lecture commune avec Maned-Wolf et un ressenti au diapason.

Arkane : une ville labyrinthique, bâtie selon la légende par sept maisons toutes puissantes, et dont les luxueux niveaux supérieurs sont occupés par un pouvoir corrompu. Là, ont cours intrigues incessantes, empoisonnements, meurtres, magie noire et décadence.
Après le massacre de son clan, Oziel, fille de la maison du Drac, s’enfuit des Hauts de la ville. Elle espère gagner les Fonds afin de rejoindre son frère condamné, et de lever une armée parmi les prisonniers du terrible bagne dans les profondeurs de la cité.
Oziel rencontrera sur son chemin Renn, un apprenti-enchanteur de pierre, et Orik, guerrier venu d’une lointaine contrée…

Ce premier tome d’Arkane, s’intitule La désolation, un titre approprié de multiples façons….

Le lecteur est convié à suivre trois destins entremêlés. Celui d »Oziel, jadis une beauté, mais ça c’était avant ( 😉 ). Avant le massacre de sa famille, les Dracs, avant l’absorption d’une potion qui va la défigurer vraisemblablement à jamais, avant son périple à travers la cité. En effet, la demoiselle cherche à rejoindre son frère dans les bas-fonds d’Arkane, traversant alors de multiples épreuves et découvrant une misère toujours plus sordide. Ce voyage s’apparente à une traversée de l’enfer, où la détresse personnelle côtoie la désolation alentours.

Il faut préciser que cette famille fait partie des sept clans fondateurs de la ville et par extension du pays. Ils gouvernent ensemble sous l’égide de figures tutélaires – ainsi le Drac pour la famille d’Oziel (dragon). La puissance d’Arkane repose sur un savant équilibre des pouvoirs mais également sur la croyance (avérée) de la protection de ces totems. Une terrible menace pèse sur chaque âme si cette symbiose est rompue, avec par exemple l’anéantissement d’un clan… Cela tombe bien, une armée redoutable se tient à la frontière, semant le chaos et la désolation sur son passage.

Arkane se trouve donc en bien mauvaise posture. Or, pris dans des enjeux politiques et des luttes d’influence, les puissants sont aveugles à cette terrible menace.

Orik, un guerrier étranger se propose d’avertir ce « beau » monde. Chemin faisant, il  exige que Renn, un apprenti enchanteur de pierres, lui serve de guide jusqu’au fleuve desservant la ville. Lors de ces passages, nous y rencontrons une troupe de mécrosés, la maladie dont est désormais affligée Oziel et qui ressemble à un croisement entre la peste et la lèpre. Pas très glamour… Il semble d’ailleurs que la réussite de cette expédition soit le seul espoir de préparer la cité à affronter le mal sur le point de s’abattre sur tous.

Les dirigeants ont l’esprit entièrement tourner vers leurs petites manœuvres personnelles et politiques, les yeux centrés sur le cœur d’Arkane, loin, très loin des affres de la frontière. Noy, un de ces fils à Papa s’implique contre son gré dans les affaires politiques de la cité, pris dans une désolante partie de jambes en l’air.

J’ai eu du mal à accroché aux divers personnages qui ne font que subir les événements. Prenons Oziel, dont la beauté est ravagée par la prise de cette potion avec le fol espoir que la fiole offerte soit réellement un antidote à la maladie. Pierre Bordage cherche à transformer cette héroïne typique de fantasy en un personnage plus subtil. Elle entretenait avec un de ses frères une relation presque incestueuse (caresses, baisers). Mais, celle information fait un peu cheveux dans la soupe; elle sonne faux n’emmenant rien à l’histoire ni au personnage au final. Nous l’apprenons dès le premier chapitre de l’histoire, et puis voilà… Par la suite, elle tombe de piège en piège, s’en sort grâce à des interventions d’autrui au timing parfait, possède une âme pure et naïve.

Que ce soit Noy ou Renn, les deux jeunes hommes me font penser aux héros de la High fantasy emportés par le destin dans une aventure qui va révéler leur nature. Eux aussi, subissent et sont en réaction plutôt que dans la prise en main et l’acceptation de leur voie. Et nous nous retrouvons avec des protagonistes plutôt stéréotypés malgré les tentatives de leur donner un poil d’ambiguïté (ce qui ne fonctionne pas à mes yeux).

Je ne pense pas qu’ils soient bancales ou incohérents, car ce n’est pas la cas, mais nous les avons croisés maintes fois.  Même si un vernis un peu plus dark cherche à leur fournir de la nuance, ce prisme-là n’est pas adapté.

Ce constat s’applique également à l’histoire et aux événements eux-mêmes. Ce n’est pas des lignes de dialogues avec un ou deux gros mots, des scènes un peu corsées, ou la présence des mécrosés qui vont projeter ce roman dans la Dark fantasy. C’est un esprit et une ambiance à tout niveau qui l’induisent.  Aussi, ai-je eu l’impression de lire un roman de fantasy française relevant de la high fantasy se parant de quelques oripeaux de Dark. Malheureusement, j’en ai fait le tour, et l’impression qui s’en est dégagée c’est d’avoir déjà lu cela et relu ce genre de récits, d’avoir vu et revue ce genre de personnages, et ainsi de suite.

Attention, ce n’est pas mal écrit ou mal construit. Paradoxalement : bien au contraire.

L’écriture est très fluide, plaisante, le tout se laisse lire facilement. L’intrigue est bien pensée, la narration alterne les points de vue donnant du corps et de la richesse à Arkane et enfin l’action est au rendez-vous avec tuiles sur tuiles, pièges sur pièges. C’est haletant. Mais déjà lu.

Cette critique est assez mitigée, j’en ai conscience. J’avais été enchantée par mes précédentes lectures de Pierre Bordage, alors sans doute mes attentes étaient-elles trop élevées.

 

Ce livre est pour vous si :

  • si souhaitez lire un roman plein de peps
  • si vous aimez la fantasy francophone

Je vous le déconseille si :

  • vous ne jurez que par les récits ambivalents et tout en nuances.

 

Autres critiques :

Maned-Wolf – Amanda

Challenges :
Challenge Littérature de l’Imaginaire – 5° édition

 

37 réflexions sur “Arkane de Pierre Bordage

  1. J’avais peur de ce côté pas surprenant, classique… Mais surtout les personnages qui subissent c’est souvent rédhibitoire pour moi.

    Je l’ai acheté donc je le lirai un jour mais c’est pas vraiment une priorité.

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  2. Coucou
    Je me souviens avoir bien aimé mais c’était mon tout premier Bordage, je lirai au moins le T2 pour voir, Noy est un connard j’ai donc eu du mal avec lui même pour ses malheurs je me disais surtout « bien fait pour ta gueule ahah » 😈

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  3. Et bien… Je comprends mieux pourquoi tu es mitigée à propos de ce livre. Je suis moi aussi du genre à aimer les subtilités, tant dans l’intrigue que dans les personnages.
    J’espère quand même l’apprécier (ça sera mon premier Pierre Bordage, donc je n’ai pas d’attentes spéciales ;-))

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    • Exactement, j’avias déjà lu du très bon de Bordage, celui-ci ne fait pas partie des meilleurs.
      Ensuite, il faut relativiser, cela fait plus de 30 ans que je lis de la fantasy, j’ai des attentes nettement plus élevée qu’un lectorat plus dans la découverte. Pour ce public -là ce roman sera une bonne pioche.

      Pour nous, c’est déjà lu. 🙂

      C’est à souligner qu’il y a du positif et que le livre va plaire à une cible plus adéquate.

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  4. J’ai sous le coude un Bordage qui m’attire bien davantage !!! (E ça rime en plus 😉 )
    Les Fables de l’Humpur sera certainement l’heureux élu !
    Quant à celui-ci, j’ai bien peur de le laisser de côté…
    Merci de m’aider à faire les bons choix 🙂

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    • Bordage a écrit mieux que cela à mon avis. Mais ceci dit, cette aventure peut largement plaire à un public moins exigeant que ma pomme.
      Je pense qu’il te faut basculer sur un autre roman de l’auteur!

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  5. J’avais eu l’avis d’un ami qui l’a refermé et m’a regardé en me disant : « nope, pas pour toi, trop bancal » xD
    Du coup à lire ta chronique je confirme : c’est à lire en cas de disette, mais vu le nombre de titres disponibles en Fantasy y’a largement moyen de trouver mieux !

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