ZeroS – Peter Watts

Prix des lecteurs Bifrost 2019 – nouvelle étrangère

Bifrost 93

Le long trajet en direction des Alpes fut l’occasion de me plonger dans un peu de lecture. Au programme de mon dimanche, les nouvelles publiées en 2019 par la revue Bifrost, récompensées par le prestigieux prix des lecteurs, lecteurs connus et reconnus dans le monde entier pour leur bon goût en matière SFFF!

Ce  numéro a déjà fait l’objet d’un article dans les pages du blog, cependant avec le challenge du Maki visant à mettre en lumière le format court, il semblait dès lors indispensable qu’elles figurassent dans l’anthologie du Lémurien.

« Asante part en hurlant. L’enfer est une chambre de réverbération pleine de cris, d’eau de mer et de chocs métalliques. Des ombres monstrueuses passent sur les cloisons, de la lumière verte ondule et s’entrecroise sur la moindre surface. Telles des créatures qui surgissent d’un lagon brillant, les S?hilites émergent du puits central en ouvrant le feu : le milieu du corps de Rashida explose en une brume sombre, sa moitié supérieure tombe sur le pont. Kito est toujours en train de se traîner vers le fusil à harpon sur le séchoir… comme si un vieil outil de pêche pouvait repousser ces monstres avec leurs flingues, leur air comprimé et leurs petites cartouches qui s’enfoncent loin dans votre chair avant de vous montrer l’effet sur vos intestins de la libération de cinq cents atmosphères. Asante a moins que ça. Il n’a que ses poings. »

J’ai lu et découvert à nouveau ce texte de Peter Watts, en connaissant à l’avance la chute de l’histoire. La nouvelle prend une saveur quelque peu nouvelle. Le levier de la surprise n’opérant plus, ce fut donc l’anticipation qui prit le relai, avec un œil plus attentif. Au final, une conclusion s’impose : j’adore Peter Watts.

Asante est mort. Violemment.

Un marché lui est alors proposé : une vie contre quelques années de servitude. Pas si loin du pacte de Faust, le lecteur va découvrir une fois encore un monde plein de violence et de technologie. Une guerre fait rage dont les tenants et les aboutissants nous échappent (et je crois que son expérience personnelle avec certains grades-côtes transparaît quand même dans ces pages). Nous nous interrogeons, comme bien souvent avec cet auteur, sur le compas moral de l’entreprise. Difficile de savoir si Asante n’a finalement pas signé avec quelque diablerie…

L’intérêt essentiel ne réside pas seulement dans ces zones d’ombres, ces noirceurs qui vous attendent et qui se corsent après chaque interventions et conversations. En effet, Peter Watts construit avec Asante un personnage de zombie. Mais, nous sommes très loin du mort-vivant se régalant de tripailles et de giclées d’hémoglobine. Chez Watts, le zombie est un « zombie philosophique« , un être qui prête son corps et perd le contrôle pour un temps plus ou moins long, ou contraint, pour mener des opérations secrètes.

Cette notion est largement mise en avant dans l’entretien présent dans votre revue préférée et qui éclairera votre lecture de la dite nouvelle d’une saveur nouvelle, et sans doute encore plus amère. Difficile de rester indifférent, et côté narratif et dramaturgie, c’est à la hauteur de mes attentes.

Le récit se situe dans l’univers de Vision Aveugle, un chef d’œuvre du Premier Contact, ainsi que dans celui d’Echopraxie.  Elle revêt donc un double intérêt supplémentaire. Les lecteurs désireux de découvrir ce diptyque de l’auteur canadien pourront en profiter pour se frotter à la plume et ce monde futur. Ceux qui ont aimé cette aventure spatiale prolongeront le plaisir avec un texte propre à mettre vos neurones en émoi.

A demain pour la seconde nouvelle lauréate de 2019.

Nouvelle gratuite sur Bifrost!

C’est lundi! le lundi c’est chez le MAKI !

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illustration : Mack Sztaba

9 réflexions sur “ZeroS – Peter Watts

  1. Je vois l’idée mais, entre autres, le concept du « zombie » n’a jamais réussi à être compréhensible pour moi, une sorte de « ta gueule c’est scientifique » qui m’a laissé sur le côté – mais c’est moi qui ai certainement raté quelque chose. Et malgré tout cela, ça se lit plutôt bien, c’est que l’auteur doit être plutôt bon. =P

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