L’ombre du dragon – Miles Cameron

Aussi sombre que chaotique

Renégat, tome 3

Bragelonne

Renégat de Miles Cameron est une trilogie (désormais suivie de deux autres tomes Outre-Atlantique) de fantasy, librement inspirée du cycle arthurien. J’ai déjà eu le bonheur de vous chroniquer les deux premiers volumes qui m’avaient enchantée, aussi, c’est avec délectation que j’ai poursuivi cette aventure en compagnie de Gabriel, le Chevalier Rouge.

La légende du Roi Arthur m’a poussée très jeune à l’exploration de ce mythe à travers les lectures de plus ou moins grands écrivains. Cette même avidité m’a conduit à la fantasy, dévorant sur mon passage tout ce qui avait trait de près ou de loin au Roi Arthur, et essentiellement à Merlin.

J’aime que le mythe soit malmené, explosé, découpé, scruté, analysé, décortiqué et pourquoi pas déstructuré, du moment que règne un parfum arthurien, et que ce soit bien fait.

C’était la promesse de Renégat.  La trilogie se place non pas du point de vue éculé des Chevaliers de la Table Ronde, d’Arthur ou d’un autre héros de cette galante et vertueuse compagnie mais prend le contre-pied avec comme personnage central : Mordred. Il s’agit du fils illégitime que le Roi Arthur a eu de sa relation incestueuse avec sa demi-sœur Morgause (connue aussi sous le nom de la Fée Morgane).

Un mythe sous dark influence

Une différence majeure avec bon nombre de récits arthuriens réside dans son ambiance résolument tournée vers la Dark Fantasy. Toutefois, il ne faut pas s’attendre à une épopée soufflant l’amertume et la noirceur de La Compagnie Noire de Glen Cook, ou encore s’affranchissant des nombreux codes moraux d’Abercrombie. J’ai cherché longuement un exemple parlant, et étonnamment, c’est vers la Flintlock que j’aurais tendance à me tourner.

Il n’y a aucun canon, arquebuse ou tout autre instrument à poudre noire dans la trilogie Renégat. Nous sommes dans une veine directement issue de la Chevalerie, avec destriers, lance, épée et tout autre objet contondant. Malgré le décorum mis en scène, le lecteur ne doit pas s’attendre à lire les aventures de preux aventuriers, défendant la veuve et l’orphelin, s’élevant contre la tyrannie, ou encore formant une compagnie de héros dans l’intention de pourfendre le mal.

Un légende revue et corrigée

Déjà la compagnie du Chevalier Rouge est composée de mercenaires, monnayant son expertise martiale contre monnaie sonnante et trébuchante. C’est ainsi que ses membres ont combattu autour de l’abbaye de Lissen-Carrak dans Chevalier Rouge, auprès de l’Empereur dans La Lame Noire – le tout en respectant les gros marqueurs le la légende arthurienne.

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Dans L’Ombre du dragon, nous retrouvons les principaux protagonistes : Gabriel, Thorn, les français Galliens, Le roi, la Reine. Nous les avions laissé dans des zones floues, mais porteuses de dangers et de turpitudes, à la veille du Grand Tournoi organisé par le Roi (Arthur), siège de grandes rivalités. Dans la légende, Guenièvre est accusée d’infidélité, et son sort doit être réglé lors d’un duel judiciaire. Nous aurons droit peu ou prou à ce déroulement, mais avec forces de rebondissements et de tortillements. Disons, que l’intrigue ne se résous pas aussi directement dans ce troisième tome…

En outre, nous avions quitté nos héros avec quelques promesses alléchantes sur le feu. Miles Cameron ne les oublie pas et nous propose donc de clore ces chapitres.  Au Nord, Thorn n’a pas renoncé à soulever les Monde Sauvage contre les Chevaliers de la Table Ronde du Roi (il s’agit des pictes et de leur alliés ailés, poilus ou à plumes), et pour ajouter aux charmes de ce sorcier, il semblerait qu’il soit de mèche avec une Puissance primaire… Dès lors, seule une bataille gigantesque pourra faire pencher la balance.

Plus au Sud, les galliens, sous l’impulsion de leur monarque, cherchent non seulement à créer des difficultés en Alba, mais surtout  à fomenter une guerre civile dont ils serainet les principaux bénéficiaires. Dans la légende, Guenièvre est accusée d’infidélité, et son sort doit être réglé lors d’un duel judiciaire. Cameron met ainsi en scène, cet épisode légendaire, mais en détournant s’affranchissant largement du modus opérandi initial. Nos galliens utiliserons tous les procédés pour parvenir en entacher définitivement la réputation royale et conserver leur influence (néfaste) sur le Roi. Nous aurons doit peu ou prou à un déroulement dans le sens de la tradition, mais avec forces de rebondissements et de tortillements.

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Enfin il y a le mystère contenu dans le titre. Nous avons déjà eu à faire à M Smythe, le dragon précédemment. Et si vous avez quelques souvenirs du mythe arthurien, vous avez en mémoire le combat spectaculaire entre deux dragons,… Miles Cameron reprend des ingrédients déjà connu pour les assembler à sa main et les accommoder façon dark fantasy.

Des personnages en nuances

Comment rendre hommage au code de la Chevalerie sans tomber dans le gnan-gnan et sans se détourner de sa feuille de route axée sur une ré-écriture Dark fantasy ?

Combiner le crédo de l’un avec la morale ambivalente de l’autre est – et était – une gageure de taille. Jusqu’à présent, Mile Cameron y était parvenu en contournant quelque peu l’obstacle avec sa compagnie de Chevaliers mercenaires (les lances) et en choisissant un personnage à l’aura négative dans l’imaginaire collectif. Il s’agissait plus d’un réhabilitation au final….

La difficulté se renforce dans L’Ombre du Dragon, car nous plongeons en pleine lutte entre royaumes, Galle contre Alba, Monde Sauvage contre Monde civilisé, les éternels contre les mortels, et oui, quelque part, le bien contre le mal. Mais de dichotomie, il n’y a point, et l’écueil est esquivé avec souplesse, tant les uns et les autres partagent des traits communs – bons ou mauvais.

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Le parti-pris du Chevalier Rouge s’apparente vraiment au crédo de la défense de la veuve et de l’orphelin. Cependant, son attitude et ses états d’âme ne flirtent aucunement avec les pensées pures du paladin. Et, je ressort de ma lecture amplement satisfaite. J’aurais même pu avoir un coup de cœur pour ce dernier volume, Mais….

Une écriture dans la continuité

Bordel! mais c’est quoi ces 150 premières pages!!! La bande est réunie dans l’Auberge, papotte, bois, prend du bon temps, nous rappelle les événement précédents… Mais pendant quasiment 150 pages, il ne se passe RIEN. Que du blabla!

C’était long. J’ai mis une semaine à les lire,  à rapprocher des 700 dernières page lues en 4 jours… Miles Cameron a soufflé le froid et le chaud sur ce troisième et denier volet. Une fois, cet obstacle dépassé, le rythme s’accélère, et nous vivons l’aventure promise. Mais bon sang, que fait l’éditeur das ce cas ?

Autrement, fervent admirateur du moyen-âge, l’auteur nous livr de beaux combats violents, acharnés et sanglants; je recommande particulièrement les séances de joutes aussi brutales que bruyantes. De plus, vous ne serez pas surpris d’achever votre lecture en connaissant bon nombre de pièces d’armure. Ce côté historique n’est pas pour déplaire en mêlant le mythique et le véridique. L’alchimie fonctionne parfaitement.

Question plume, pas d’évolution à noter, c’est direct et ne s’encombre pas de froufrou. mais après tout, le chevalier n’est pas là que pour conter fleurette.

Mas aussi :

  • Une farandole de personnages qui vaut le détour.
  • Un bestiaire digne d’un Monde Sauvage
  • La Chasse Sauvage qui s’invite dans la partie
  • Un système de magie fort intéressant

 

Un troisième et dernier tome qui démarre de manière bringuebalante, avec une énorme longueur. Une fois cette maladresse passée, les aventures épiques du Chevalier Rouge vous plongent dans un maelström d’émotions, de magies et de combats de toutes natures. Le mythe arthurien est détourné avec élégance, tout en étayant ses grandes lignes, l’ensemble baigne dans une veine dark fantasy qui lui sied à merveille.

Ce livre est pour vous si :
  • vous êtes fan de Dark fanatsy
  • vous êtes prêt à pardonner cette entame maladroite
  • voulez vous perfectionner sur le Moyen-Âge
je vous le déconseille si :
  • vous êtes aux trilogies
  • vous ne vous imaginer pas Arthur dans un mauvais rôle
  • avez les nerfs fragiles
Autres tomes :

 

17 réflexions sur “L’ombre du dragon – Miles Cameron

  1. Attirant, même si le nombre de pages annoncé m’effraie un peu.
    J’imagine aisément que le traitement de Mordred diffère de ce que Justine Niogret en a fait (c’était… spécial).
    Est-ce qu’il faut être docteur en saga arthurienne pour bien apprécier?

    Aimé par 1 personne

    • Absolument pas besoin se pré-requis pour apprécier. Il ne faut même pas chercher à faire les rapprochements en cours de lecture, ils viennent après et s’imposent – ou pas – en fonction de notre connaissance du mythe qui est ici retravaillé.

      Non, cela se lit bien.

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    • Ah! Oui! C’est vraiment pas mal. Je t’incite à relire ma critique sur le tome 1. Il faut savoir que les perso sont assez nombreux et le début de lecture pas si aisé.
      Mais quel pied ensuite!

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